Après avoir laissé la SNCF organiser la banqueroute de SeaFrance, l'apprenti sorcier Sarkozy désavoue ses propres ministres, qui, hier matin encore, jugeaient le projet de reprise en Scop par les salariés comme une ineptie.
Aujourd'hui, comme l'a proposé la Parti de Gauche, la seule solution viable en coopérative serait celle de la SCIC (société coopérative d'intérêt collectif), qui permet d'associer les salariés, les collectivités locales, des investisseurs privés, des usagers et l’État lui-même.
Ce qui aurait comme immense avantage, non seulement de sauver l'entreprise, mais de l'arrimer au service public des transports.
Une telle solution nécessite de désobéir aux diktats de la Commission européenne, qui interdit à l'Etat d'investir dans une entreprise privée. Et cela, Sarkozy refuse de le faire.
A ce point, l’idée même d’une Scop « classique » (renommée depuis deux ans, Société Coopérative et Participative) est, dans le cas de SeaFrance, un leurre. Autant il existe des Scop de 1 200 salariés vivantes et prospères créées puis développées au fil des ans, autant aucune Scop ne venant d’une reprise d’entreprise en difficulté de cette taille n’a pu se pérenniser (rappelons-nous de Manufrance dans les années 80).
Et ce n'est pas uniquement la taille de l'entreprise mais aussi le contexte ultraconcurrentiel (différenciation uniquement par les prix), avec le dumping social des compagnies britanniques, qui rend peu crédible le projet de scop.
Nous ne réjouissons pas de cette pseudo-reprise en Scop : elle est simplement la démonstration d’une capacité du pouvoir actuel (mais nous l’avons également vécu dans les années 80) à laisser croire (pour un court temps) que les salariés de l'entreprise pouvaient reprendre leur destinée en mains sans soutien direct de l'Etat... Il sera facile au pouvoir de « démontrer » leur incapacité à faire vivre l’entreprise (problèmes de financement, de démocratie d’entreprise, de management, etc…).
Il n'est pas exclu que nombre des salariés de SeaFrance « prendront » leurs indemnités « extra-légales » et s’en iront chercher du travail ailleurs (ce qui est respectable); d’autres, n’investiront qu’une partie de leurs indemnités, compte tenu de leurs faibles revenus. Le financement final sera insuffisant et il sera alors facile pour le gouvernement d’expliquer que la « faiblesse de l’investissement des salariés » aura failli face au marché et à la réalité de la concurrence. Le pseudo-soutien du Président tout-puissant au projet de Scop est un piège. C’est tout simplement une escroquerie de campagne.
Social, économie sociale et solidaire