Je suis intervenu, avec ma camarade Sylvie Mayer, co-animatrice avec moi-même du Front de Gauche de l'Économie sociale et solidaire, au nom de Jean-Luc Mélenchon, candidat à la Présidentielle, lors du « Forum pour une économie démocratique: les candidats prennent position ». L'événement, qui a eu lieu le 2 mars dernier, était organisé par le CEGES, principal regroupement des acteurs de l'économie sociale et solidaire en France.
Le programme du Front de Gauche s’intitule « l’humain d’abord », et c’est ce qui fait toute sa cohérence. Les diverses forces de la gauche de la gauche, mais aussi chose nouvelle, des citoyens non organisés, ont entamé un travail collectif de co-construction avec les acteurs de la vie citoyenne dans des assemblées citoyennes et des ateliers législatifs. Nous avons, pour ce faire, créé des Fronts de Gauche thématiques dont un FDG de l'ESS que nous représentons ici.
Des propositions favorables à l’ESS traversent l’ensemble de notre programme, dans ses aspects sociaux, économiques et écologiques; ainsi en est-il de la formation des jeunes qui doit inclure l’économie sociale dans ses volets économiques.
D’autres propositions nécessitent le développement de l’économie sociale et solidaire, en lien avec le développement des services publics : pour nous ce développement, n’est pas un aspect marginal mais essentiel dans la construction d’un système alternatif. L'ESS montre dans ses principes mêmes de non lucrativité, de démocratie et d'égalité la possibilité effective et concrète de la transformation sociale et écologique que nous appelons de nos vœux.
Enfin, nous faisons des propositions aux plans européen et international qui auront l’ESS pour actrice. Mais cela exigera de s'affranchir du Traité de Lisbonne et de ne pas entrer dans le Mécanisme Européen de Stabilité qui nous retire toute possibilité autonome de prendre un autre chemin.
Nous allons maintenant développer quelques propositions emblématiques qui concernent votre secteur. Nous ne développerons pas tout : vous pouvez vous reporter notamment à ce que Jean Luc Mélenchon, qui nous a chargés de l’excuser et de vous saluer, a répondu à l’USGERES et à ce qu’il dira devant la CPCA le 10 mars prochain.
La planification écologique
Il s'agit à la fois d'une question d’échelle (à moyen et long terme avec des mesures industrielles de reconversion), et d’implication citoyenne démocratique.
Chacun a conscience aujourd'hui que la la catastrophe écologique remet en cause potentiellement les conditions même de la vie humaine sur Terre.
Le réchauffement climatique, la destruction de la biodiversité, l’épuisement rapide des ressources naturelles ne sont pas des catastrophes purement naturelles, mais le résultat des logiques capitalistes et productivites du profit maximal à court terme.
Nous proposons la planification écologique comme moyen de redéfinir nos modes de production, de consommation et d’échange en fonction de l’intérêt général de l’humanité et de l’impact de l’activité économique sur l’écosystème. Elle permettra de préciser les orientations et les investissements publics nécessaires pour enclencher une transition écologique et promouvoir un développement humain durable créateur d’emploi et facteur d’égalité sociale.
Il s'agit d'une ambition nationale, voire européenne, de relocalisation, de reconversion écologique et sociale de l'économie et de priorité aux circuits courts dans une démarche d'intérêt général.
Par exemple, nous réaffirmons l’exigence de la maîtrise publique, sociale et démocratique du secteur de l’énergie, seule garante de la transparence, de l’indépendance, de l’expertise et de la qualité des installations et des exploitations.
Nous créerons un pôle public de l’énergie comprenant EDF, GDF, Areva et Total renationalisés. Ses salariés seront toutes et tous sous le même statut. Ils et elles seront associés étroitement aux choix de gestion de l’entreprise publique et leur liberté d’expression sera garantie. Les citoyens seront également associés à la direction de ce pôle. Nous agirons parallèlement pour la création d’un tel pôle public au plan européen.
Là encore les acteurs auront toute leur place pour développer leurs activités: aux pouvoirs publics la maîtrise absolue de la distribution, alors que nous favoriserons, pour la production d'énergie, le développement de structures coopératives locales, au plus près des territoires. Citons Enercoop qui articule association des acteurs locaux et publics, énergies renouvelables et problématique d'intérêt général). Voilà un bon exemple de nouvelles relations entre service public et ESS. Il s'agit d'un modèle idéal en quelque sorte; c'est pourquoi nous parlons globalement de socialisation des entreprises et non de retour systématique aux nationalisations centralisées.
Revenons à la planification écologique: elle s’appuiera sur un plan écologique débattu et voté au Parlement, assorti d’une loi de programmation financière. Sur tous les territoires, les citoyens seront associés au débat sur les objectifs et les actions à développer; l'implication citoyenne devra faire du débat préalable à la planification écologique un exercice exemplaire de démocratie participative. Mais aussi dans sa mise en œuvre, dans les territoires comme dans les enteprises... Il faut penser sur la durée, c'est pourquoi il faut planifier la transition écologique; une politique des petits gestes ou qui ne tiendrait pas compte des enjeux industriels serait inefficace.
Mais cette planification écologique ne pourra fonctionner que si les citoyens se l'approprient en amont et tout au long du processus. Chacun comprendra ici en quoi les acteurs de l'ESS peuvent y jouer un rôle central...
Pôle public financier
Nous proposons la création d’un pôle financier public par la mise en réseau des institutions financières publiques existantes (Caisse des dépôts, Crédit foncier, OSEO, CNP, Banque postale), des banques et assurances mutualistes dans le respect de leurs statuts et de banques et compagnies d’assurances qui seront nationalisées. Ce réseau sera chargé d’une nouvelle mission de service public du crédit et de l’épargne, au service de l’emploi, de la formation, de la croissance réelle et de la préservation de l’environnement. C’est donc un dispositif essentiel pour sortir de la crise et de l’emprise des marchés financiers.
Son action permettra de soutenir localement les luttes sociales et s’appuiera sur des fonds régionaux pour l’emploi et la formation. Les salariés et leurs représentants disposeront d’un droit de saisine de ce réseau. La « gouvernance » d’un tel pôle reposera sur des pouvoirs nouveaux exercés par les représentants de la Nation, les salariés travaillant dans ces institutions et leurs usagers : entreprises et collectivités territoriales, bien sûr, mais aussi représentants des salariés, des chômeurs et précaires, des associations de consommateurs et les associations de défense de l’environnement.
Dans ce pôle public et social financier, les banques coopératives auront toutes leur place, et la voix des sociétaires, personnes physiques ou morales devra se faire entendre pour intervenir sur les décisions stratégiques. Il s’agit bien de permettre une appropriation citoyenne du crédit et de l’épargne. Le succès d’un tel dispositif financier dépend en grande partie de cette appropriation, et on voit combien les banques coopératives y ont un rôle à jouer, à condition d’y revivifier les pratiques de l’économie sociale.
Bien évidemment il ne faudra pas attendre que ce pôle soit organisé pour imposer aux banques l’octroi de crédits aux PME-PMI qui en obesoin, et notamment à celles qui sont sous forme coopératives.
Droit de préemption des salariés et soutien aux formes de propriété coopérative
Notre programme prévoit l’extension de la propriété publique par le développement des services publics. Il promeut de nouvelles appropriations sociales par la nationalisation de grands leviers de l’action économique, industrielle et financière. Il propose des formes décentralisées de la propriété sociale. Il veut aussi systématiser le recours à l’économie sociale et solidaire (ESS)...
Social, économie sociale et solidaire