Chartres, Eure-et-Loir. Par ce matin d'hiver du jeudi 14 janvier, la gare est couverte de neige. Christophe Ventura et moi représentons la direction du Parti de gauche en soutien aux salariés de Philips (lire post du 12 janvier). Nous les rencontrons devant la préfecture, alors qu'ils y envoient une délégation.
–
Tu es pour l'autogestion
et les coopératives?”
– Oui!
– Tu crois que c'est ça
qu'on fait à Dreux?
– Un peu, non?
– Bah, on va pas être
copains... Les gars, ils défendent leur outil de travail. Point
barre. Le reste, c'est des conneries véhiculées par la presse...
Nous, on veut faire plier l'Etat, c'est là que ça se passe.
–
Mais, euh, on peut faire les deux, non? Continuer à produire en
autogestion et faire pression sur les pouvoirs publics et le
groupe... Ca peut être comlémentaire...
– Pas du tout, c'est
même contradictoire. Il s'agit d'une lutte syndicale classique et
rien d'autre.
Morceau choisi d'un dialogue entre le secrétaire départemental de FO et votre serviteur. Un jeune type, plutôt sympathique, qui réprésentait le journal du NPA, tente de relancer la conversation en illustrant son propos d'exemples tirés du mouvements des usines coopératives argentines. En vain. Notre syndicaliste de choc le coupe net: “Tu as la preuve de ce que tu racontes? Tu crois ce que racontent les journaux?” Il daigne prendre sa brochure sur le sujet que lui tend le jeune homme, la glisse dans sa poche et tourne les talons.
Ca
commence fort.
Nous discutons ensuite avec plusieurs salariés
parmi la centaine présents. Il y a là un bon tiers de femmes,
toutes ouvrières dans la boîte depuis souvent vingt ans.
Ils
en sont à leur troisième plan social depuis 2003 et ne croient
plus trop à une issue positive, tant Philips a bien prévu son
coup. Preque toutes les familles sont atteintes par le chômage. Ils
ne comprennent pas qu'on les jette pour un coût supplémentaire de
6 euros par téléviseur. Ils sont dignes et déprimés.
Nous
comprenons que le mouvement est divisé entre ceux qui ne croient
finalement plus qu'à négocier les meilleures indemnités possibles
(ceux-là sont plutôt influencés par Force ouvrière) et d'autres,
qui ne veulent pas se résigner, oscillant entre une posture de
baroud d'honneur et, pourquoi pas, la reprise de l'usine par les
salariés.
Nous repartons vers Paris, gelés après deux
heures dehors par grand froid, mais plus que jamais décidés à
poursuivre notre démarche de solidarité. Cela remet les idées en
place de rencontrer des gens comme ça, on est loin du triangle
République-Bastille-Châtelet.
Toujours est-il qu'ils ont
arrêté le mouvement de “contrôle ouvrier” de la production,
suite aux menaces de la direction.
En complément, je vous
invite à lire un article de l'animateur de la CGT de Philips Dreux
qui date de dimanche dernier, publé sur le blog de la sectio
syndicale
ainsi
que le très bon papier de Bertrand Bissuel dans Le Monde daté de
samedi 16
janvier.
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