Julien Terpent, conseiller communiste du 3e mérite le prix Orwell de la démocratie et des libertés pour avoir voté contre la délibération municipale validant l'installation de caméras de vidéo-surveillance dans le 3e et plus généralement à Paris.
Flora Bolter, Denis Murat et Patricia Brebion méritent bien un encouragement du jury pour s'être abstenus, alors que tous les autres élus, Pierre Aidenbaum en tête, recevront bientôt le bonnet d'âne du tout-sécuritaire... A suivre.
En guise de rappel, je vous livre l'article consacré à cette question dans le Bazar:
Trois questions à la section Paris Centre de la Ligue des Droits de l’Homme :
L'installation de caméras de surveillance porte-elle atteinte aux libertés individuelles ?
Par nature, l’enregistrement de l’image d’une personne sans son consentement est une atteinte à sa vie privée.
Mais au-delà de cette captation illégitime, c’est la conservation et l’utilisation de ces images qui sont potentiellement dangereuses. Qui peut avoir intérêt à visionner ces images ? La police, les administrations, les collectivités locales, l’employeur, le voisin… on voit bien que l’outil peut se révéler sans limite.
Nous entrons dans une société où nos faits et gestes seront soumis à un regard permanent et par voie d’incidence à un jugement permanent. Nos déplacements, nos rencontres, nos loisirs, nos actions de tous les jours et demain peut être nos paroles seront susceptibles d’être connues et exploitées.
L’argument qui consiste à soutenir que lorsque l’on n’a rien à se reprocher alors il n’y a rien à cacher aboutit à ce que chacun soit obligé de justifier à chaque instant de son comportement. Cette logique d’un monde sous surveillance conduit à la négation des libertés individuelles.
Vision alarmiste diront certains.
Pourtant rien ne permet d’assurer que les garanties mises en place aujourd’hui seront pérennes (charte, comité d’éthique, archivage limité, floutage des visages). Les outils techniques permettent déjà de stocker des millions d’heures d’images et de les traiter. Le futur proche permettra à moindre coût la miniaturisation des caméras, le recours à des drones, la reconnaissance faciale et vocale, le recoupement des données à une échelle illimitée… Nous voyons bien qu’à chaque fait divers, le gouvernement en profite pour restreindre les droits. C’est pour cela que la Ligue des Droits de l’Homme ne souhaite pas rentrer dans ce cercle vicieux et refuse de s’associer à des comités de surveillance chargés de contrôler l’usage de ces images.
Le plus cruel dans cette évolution, c’est que nous y allons en chantant…
Est-ce que les caméras de surveillance sont un outil efficace dans la lutte contre l'insécurité ?
Les expériences ne manquent pas puisque des villes comme Londres ont mis en place plus de 500.000 caméras. La criminalité est-elle moins importante qu’à Paris ? Cela a-t-il empêché des attentats de se commettre ? Les études démontrent au contraire le manque de pertinence en matière de politique pénale alors que leur coût est exorbitant.
D’une part les caméras n’empêchent pas la délinquance pulsionnelle, d’autre part, elle transfère le problème vers une zone non surveillée.
La seule certitude est qu’une rue surveillée est un moyen efficace de lutter contre le sentiment d’insécurité. Mais si la logique est celle de rassurer plutôt que de prévenir, la demande ne sera jamais satisfaite.
Pourquoi telle rue aurait-elle droit à une protection et pas celle-ci ? Pourquoi tel commerce et pas celui d’à côté ? Sauf à mettre des caméras partout, il n’y en aura jamais assez.
Quelle est la position de la section Paris-centre de la LDH suite à la décision du Conseil de Paris d'implanter de nouvelles caméras de surveillance dans Paris ?
Le « plan 1000 caméras pour Paris» est d’abord un plan gouvernemental mis en place par la Préfecture de Police. Le principe d’implanter ces caméras a reçu l’aval du Conseil de Paris. Cette décision faisait d’ailleurs partie du programme de la plupart des candidats à la Mairie de Paris.
C’est malheureusement l’exemple type d’un consensus droite/gauche qui existe sur l’ensemble du territoire sur cette question. C’est d’autant plus dommage que Paris était jusqu’alors relativement épargné par ce phénomène de surveillance.
On ne peut que regretter l’absence d’un débat national sur cette question pour établir avec précision les objectifs, les risques et les garanties d’une telle politique.
On peut aussi regretter l’absence d’explications et de concertations dans nos arrondissements avec les habitants sur l’emplacement des futures caméras.
Tant sur le fond que sur la forme, la Section Paris Centre de la Ligue des Droits de l’Homme est fermement opposée à cette logique de contrôle des individus et va continuer à alerter les pouvoirs publics et les élus parisiens ainsi qu’à sensibiliser les citoyens.
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