« En coupant en deux la Révolution française,
entre les Droits de l’homme et la Terreur -marquant comme « bonne »
l’une ou l’autre phase, selon les versions-,
le récit standard de l’Histoire a fait
à la Révolution russe un cadeau empoisonné :
il lui a laissé la Terreur sans les Droits de l’homme ».
Jean-Pierre Faye, Dictionnaire politique portatif en cinq mots, Paris, Gallimard, 1982, p.149.
La Révolution française de 1789 fait encore couler beaucoup d'encre. Les débats qui ont traversé les assemblées successives, des Etats-Généraux jusqu'à la Convention, sont encore bien vivants et structurent encore largement la vie politique, non seulement dans notre pays, mais dans le monde entier. Si elle fut un moment crucial de l'histoire de l'Humanité, y faire encore référence n'implique pas de nier les autres repères de l'histoire contemporaine, qui, comme la Révolution de 1848, la Commune ou la Résistance contre le nazisme, constituent des repères fondamentaux dans la conscience collective de la Gauche.
Mais comme il est agaçant de constater, à longueur d'articles de presse et d'émissions de télévision, qui combinent argumentaires à prétention scientifique et fictions, à quel point l'offensive contre Robespierre et ses amis Jacobins prend la forme d'un tsunami idéologique. On y trouve un tel ramassis de contre-vérités et d'approximations que cela donne bigrement envie de prendre parti pour l'Incorruptible à 200%, tant la mauvaise foi est de mise dans le camp d'en face.
Le camp d'en face? Oui, les amis, c'est depuis la Restauration, mais surtout avec la construction de l'histoire de France officielle pendant le IIIe république, que s'est développé le mythe d'un Robespierre sanguinaire et despote.
Il aura fallu encore près d'un siècle pour qu'un révisionnisme anti-jacobin, voire anti-révolutionnaire, trouve sa cohérence idéologique, sous la plume de François Furet à la fin des années 1970. La cohérence est totale puisque cette réécriture de l'Histoire, s'appuyant sur la négation même du phénomène révolutionnaire, accompagna l'émergence du courant du néo-libéralisme économique, devenu aujourd'hui dominant dans les politiques menées aujourd'hui tant par les droites de tous polis que par les sociaux-libéraux de l'Internationale socialiste... tous ces gens qui ont mis trente ans à nous assommer de plans austéritaires et d'assignation à se résigner.
Pour en finir avec les ragots malfaisants sur Robespierre, Saint-Just et leurs amis, je vous conseille quelques ouvrages qui remettent salutairement les pendules à l'heure.
Edifiante est l'œuvre (1) de l'historien britannique Eric J. Hobsbawm, qui a recensé les travaux des spécialistes de la Révolution, ceux d'inspiration marxiste, comme Albert Soboul et Michel Vovelle et les libéraux, dont le chef de file a été François Furet. Il montre à l'aide d'exemples multiples en quoi la séquence de 1789 à 1794 structure encore le débat politique, non seulement en France, mais dans le monde entier...
Social, économie sociale et solidaire